vendredi 17 février 2017

Totale Eclipse Part II ou la Complainte Du Coeur Coupe Sanglier.


Merde et remerde.
Çà devient carrément dur d'écrire, y a tous les contrôles de la terre en ce moment. Des maths horribles et de l'allemand pas glop et je sais pas quoi encore. Misère.
Je me rends compte que j'ai pas fini de vous parler de Marc alors que bon je pense tout le temps à lui mais lui zéro , vu que évidemment si je vous en parle comme ça c'est qu'il m'a larguée comme une bouse.
Je vous avais laissé à la boum de Marie-Pierre, donc Marc avait sa langue dans ma bouche et la main dans mon soutif Rosy acheté aux Dames de France à la Rue Saint Ferréol encore une fois traînée par ma mère qui n'avait pas manqué  de me faire  honte en disant que j 'avais une très belle poitrine à la vendeuse. Donc main dans le soutif et déjà c'est fini je prends le métro jusqu'à la Rose, mon père vient me chercher et déjà c'est l'été et les abominables vacances en Allemagne.
S'ensuit ce que j'ai déjà raconté  les tortures punks, le mistigri, Benoît qui veut pas m'embrasser et Patou qui veut absolument.
Pourquoi, me direz-vous, je suis allée chercher ces mecs qui me plaisaient même pas alors que j'étais raide dingue in love de Marc? Mystère et boule de gomme... Peut-être parce que j'ai été appelée "boudin" ou "cageot" la moitié de ma vie  (oui même si j'ai treize ans) alors maintenant que ça a changé, en gros depuis que j'ai des seins, bin je prends des réserves de peur que ça s'arrête ou peut-être que je suis une salope (une fille qui fait ça, c'est toujours une salope mais jamais un mec, faudra qu'on m'explique), deal with it, rock'n'roll.
 Bon après, c'était les vacances et Marc c'est quand même my one and only, comme dans la chanson des Flying Pickets, badadada, badadada. (  les gars qui font les badadada, c'est autre chose que nous avec "Die Geige" en cours de musique).


All I needed was the love you gave
All I needed for another day
All I ever knew
Only you



Oui, çà a l'air naze comme ça, mais Marc c'est mon pays, mon continent, mon tout, mon évidence, la preuve que l'Amour existe, enfin l'amour normal, l'Amour jeune pas le truc à la con des parents, de toutes façons, ils font  même plus semblant.  Je voulais prouver à tout le monde que j'avais raison d'y croire plus que tout et nothing else matters. L'Amour j'en suis amoureuse depuis le premier tome d'Angélique Marquise des Anges (faut que je vous parle d'Angélique un jour) et si un jour je deviens écrivaine, je n'écrirais que sur ça parce que franchement le reste rien à battre.

Bref, j'ai bien fait attention à ne tromper Marc QUE pendant les vacances pour pas me faire traiter de pute à la rentrée. Aussi ce que je voulais je crois, c'était lui montrer que j'étais une FEMME FORTE, pas comme les connasses dans ELLE qui font semblant d'écrire ou de lire alors que sur la photo ça se voit qu'il y a rien d'écrit ou de lisible sur le bloc sténo et c'est pathétique. Non, je voulais être une nana  qui se barre avec son sac, qui allume les clopes en grattant l'allumette sur son talon et qui roule des pelles à qui elle veut entre deux gorgées de tequila. Moi quelquefois, je marche cent mètres devant mes parents en allant au Cinémadeleine et je me sens presque comme cette fille là.

Marc m'a écrit UNE lettre pendant les vacances et encore elle était bourrée de fautes d'orthographe, je lui ai fait remarquer d'ailleurs et je crois qu'il l'a mal pris, j'en ai reçu aucune autre.

A la rentrée, il  faisait la gueule  à fond. Un  petit bisou le matin et ignorée de Balzac toute la journée. J'en avais mal au cœur, cantine beurk, je pouvais rien  manger. En plus la cantine, on dirait un gigantesque cachot, elle est au sous sol avec des fenêtres fermées par des chaînes, il y a des néons qui clignotent et ce jour là, y avait les Quenelles Roses Dégueulasses, on les a balancées dans le broc à eau d'ailleurs et on s'est fait démonter. La cantine, ça a toujours été un lieu d'humiliation totale pour moi parce que a) je mange rien b) un cantinier un peu rouge avec une moustache m'a appelée "Coupe Sanglier" le jour où je m'étais faite couper les cheveux courts sur les bons conseils de Vous Savez Qui.
Coupe Sanglier Réussie.

Donc Marc, ignorance, pire qu'à l'époque Coupe Sanglier  et en plus il a commencé à rigoler vachement avec une nana qui  a doublé elle aussi, pas à cause des maths mais parce qu'elle est nulle. Elle a pas trop de seins mais elle met jamais de soutif et les mecs matent à mort vu qu'elle est tout le temps à moitié à poil. Çà a commencé à me mettre les boules, j'ai essayé de parler à Marc qui m'a dit mais non mais qui a continué à rigoler avec l'autre cagole donc je me suis dit que le rendre jaloux ça serait une bonne tactique. J'ai commencé à lui dire que d'autres mecs me tournaient autour et puis comme il s'en battait l’œuf, j'ai balancé la totale :  Patou et compagnie...J'ai même mitonné en disant que Benoît m'écrivait encore en me demandant de venir à Paris.  Il a fermé sa gueule et a continué son manège comme si de rien n'était. Moi j'étais dévastée, je bouffais même plus les sandwiches au jambon cru (en tranches trop épaisses) que ma grand mère venait m'apporter tous les matins au métro des Cinq Avenues (elle habite juste à côté), ils passaient direct à la poubelle. J'avais un peu honte en pensant à ma grand-mère qui se levait tôt le matin pour me les faire mais rien à faire ça passait pas et puis ma grand-mère, je lui ai dit dix fois que j'en voulais plus mais elle écoute rien elle est quand même là tous les matins. J'ai pensé à mettre des hauts blancs sans soutif comme l'autre pouffiasse mais rien à faire j'ai trop de seins et j'ai pas envie de me faire appeler Clarence ou la Noiraude ou un autre nom de vache.
Finalement, un jour entre midi et deux, on s'est retrouvé dans le vestiaire du stade de foot et il m'a dit "Je casse", ça a duré dix secondes et il s'est barré. Je suis ressortie de là avec la haie d'honneur de tous les connards de troisième en train de mater et de prendre les paris. Comme je pleure toujours pour un oui ou pour un non et qu'ils le savent tous très bien, je me réfugie dans un coin de ma tête et je passe en regardant droit devant moi en leur souhaitant tous d'aller bien se faire enculer à sec avec du gravier. A ce moment là, je les hais  et je mords mes lèvres parce que j'ai des envies de meurtre, des vraies, des sales, avec du sang partout et de la cervelle éclatée sur les bancs de béton et les lavabos ébréchés.

 Comme dans un rêve, j'entends la sonnerie, je récupère mon sac Chabrand et je monte en cours d'Histoire-Géo. La prof est jeune et enceinte et elle a des cheveux courts noirs pas Coupe Sanglier mais elle est pas forcément plus sympa que les autres vieux cons. Mon écriture se barre dans tous les sens, je comprends rien, en plus il faut faire un croquis de merde, je suis nulle en dessin, j'ai pas mes crayons, je sais pas colorier, je dépasse tout le temps et ça on dirait que c'est pire que d'être nulle en maths, déjà au primaire on se foutait de ma gueule et j'ai pas acheté le bon cahier de TP et la prof commence à m'engueuler, je vois plus les lignes et je sens que ça monte, ça m'étouffe presque et ça sort comme un geyser, un gros bouillon de sanglots, de larmes et de morve qui déborde de mes yeux et de mes narines, qui se déverse sur mon cahier en faisant des énormes taches et la prof me demande ce que j'ai mais je peux pas lui dire que Marc m'a larguée comme une merde pour une pétasse qui fait du 80 A mais qui au moins peut mettre des Marcels blancs sans soutif et sans prime à la Vache Allaitante comme dans mon village en Corse et elle me laisse même pas sortir cette connasse de prof et je reste là à ravaler mon cœur coincé dans ma gorge.



A Marie-Thérèse  Garro-Rainaldi . (1911/2000).